Dans
ce texte, Alain tente de nous montrer comment la conscience se constitue.
L’auteur se demande à quelles conditions on peut ou
non parler de conscience, comment celle-ci évolue à
travers le temps, il tente aussi donc de développer la question
de l’identité personnelle. Il avance dans ce texte
que selon lui, notre conscience est en devenir permanent et donc
que le moi ne sera jamais totalement construit. De plus, il montre
l’intérêt du passé dans son évolution.
Des lignes 1 à 3, Alain nous présente ce qu’est,
selon lui, la conscience, à l’aide d’un contre-exemple,
celui du sommeil, afin de nous montrer que celle-ci n’est
pas immédiate et qu’elle suppose une forme de réflexion.
Suis-je moi-même simplement et directement ? Puis, Il nous
montre des lignes 4 à 7 que notre « moi » évolue
le long de notre existence, que la conscience s’acquière
au fil du temps et que l’on ne vit pas dans un moi passé,
car la conscience n’est elle pas, par définition, une
conscience en devenir ? Aussi, il évoque l’idée
selon laquelle nous sommes libre en devenir. Cependant il insiste
sur le fait que nos actes passés se conservent dans le moi
et donc que le moi ne se résolue pas à s’appuyer
uniquement sur des évènements présents, des
lignes 7 jusqu’à la fin. En effet, la conscience n’est
elle pas constituée sur la durée ?
Partie
I (lignes 1 à 3) : définition de la conscience
Dans un premier temps, des lignes 1 à 3, l’auteur tente
de définir la conscience en l’opposant à l’état
de sommeil. Formée sur le mot science et cum (avec), la conscience
signifie le fait d’avoir une présence à soi
et aux choses qui nous entourent. C’est ce qu’il cherche
à nous montrer, que la conscience est un rapport entre le
moi et un monde extérieur. Il nous explique que la conscience
suppose une forme d’opposition entre moi et le monde, que
par la conscience je dois pouvoir distinguer à la fois ce
que je suis, moi et ce qui s’avère être des éléments
extérieurs à moi-même. D’abord, voyons
comment l’auteur définit l’état de sommeil
en lui même, et à quoi il l’assimile. Alain nous
dit seulement que « Dans le sommeil, je suis tout ; mais je
n’en sais rien. ». Ses propos s’apparentent aux
thèmes de l‘inconscient. La personne endormit n’est
plus consciente, c’est à dire qu’elle ne se rend
pas compte, elle n’a pas conscience qu’il y a un monde
autours d’elle, et dans lequel elle est présente. On
peut dire qu’elle ne se distingue plus, qu’elle ne fait
plus cette opposition entre le monde et elle même. Alain explique
que, en l‘état de sommeil, L’individu est condamné
à méconnaître ce qui le constitue et que, de
plus, il devient incapable de maîtriser le sens réel
de ses propres manifestations. Dans le sommeil, l’individu
est lui, tout entier, mais il n’a pas la capacité s’en
apercevoir et de le ressentir. Ce qu’il cherche à nous
dire est le fait que dans un état qui n’implique pas
une forme de conscience, on ne peut pas ou plus se rendre compte
de qui l’on est, de ce que l’on fait. De ce fait, Alain
nous dit que dans le sommeil on est « tout », c’est
à dire que l’on est soi même a part entière
mais aussi que l’on n’est « rien », du fait
que l’on n’a pas conscience d’être nous
et de faire partie d’un monde, autrement dit ce « tout
» est là, bien présent, mais la conscience qui
nous aide à nous en rendre compte, elle, n’est plus
là, étant donné que nous sommes inconscient,
ce qui fait qu’on ne sait « rien » de ce «
tout ». C’est que pour cela que, plus tard dans le texte,
Alain nous dit que la conscience « suppose réflexion,
division […] elle n’est pas immédiate. »
Ici , l’auteur introduit les termes de conscience réfléchit
et immédiate. La conscience immédiate implique le
fait se rendre compte de la présence des choses dans le monde,
tandis que la conscience réfléchie, elle, est le fait
de d’être conscient et de savoir que nous le sommes
(Je suis conscient de ce que je vois en même temps que de
voir). C’est-à-dire que d’une part, la conscience
permet de se retourner sur elle-même ce qui permet à
l’être conscient une critique sur lui-même et
ses actes, mais aussi, d’autre part, que la conscience, qui
est le fait de percevoir le monde extérieur, c’est-à-dire
la distinction du sujet qui n’est pas objet, est une présence
au monde qui implique une opposition claire entre soi et le reste.
la conscience est aussi une capacité d’analyse. Alain
nous montre clairement ce qu’est la conscience selon lui avec
une énumération d’opposition; « Moi et
le monde. Moi et ma sensation. Moi et mon sentiment. Moi et mon
idée. ». Enfin, avec la phrase; « C’est
bien le pouvoir de douter qui est la vie du moi », Alain renforce
l’idée évoquée d’une différenciation
sujet/objet en nous renvoyant directement au cogito cartésien
de Descartes, son maître penseur. Car en effet, « je
pense donc je suis », ainsi, l’existence humaine est
capable de saisir dans la conscience qui accompagne chacune de ses
pensées, contrairement au monde extérieur, composé
d’objets. Pour expliquer les paroles d’Alain, plus je
doute, plus je suis sur qu’il y a quelque chose qui doute
et donc que je pense, ce qui me ramène a la certitude d’être
moi.
L’auteur
dans cette première partie, tente donc de définir
la conscience (psychologique), celle-ci se comprenant selon deux
dimensions; d’une part, elle nous donne un savoir concernant
nos actes et d’autre part, elle nous donne le sentiment d’être
un moi singulier, le sujet s’affirme en s’opposant à
tout ce qui n’est pas singulier. Mais ce moi que je suis,
est il un moi inné, constant ou est-ce que ce moi est sans
cesse remodelé ? Autrement dit, suis-je le ou la même
tout au long de ma vie ou ce moi d’un jour évolue-t-il
au fur et à mesure du temps ?
Seconde
partie (lignes 3 à 7) : la conscience et l’identité
personnelle : suis-je le ou la même tout au long de ma vie
ou ce moi d’un jour évolue-t-il au fur et à
mesure du temps ?
C’est pour répondre à cette question, dans cette
deuxième partie, de la ligne 3 à la ligne 7, que l’auteur
aborde la notion d’identité personnelle. L’identité
personnelle, c’est un sentiment interne, c’est le fait
d’avoir la capacité de se dire, je suis moi, c’est
un sentiment de singularité et d’individualité
profond. Je ne suis pas comme un autre, je suis unique et donc je
suis moi. Mais comment ce construit ce moi ? Suis-je toujours exactement
la même personne tout au cours de ma vie ? La simple phrase
d’Alain, « Si l’on se retrouvait tout entier,
c’est alors qu’on ne se reconnaîtrait pas »,
est une réponse négative. Pour Alain, notre moi évolue,
même si nous restons une personne similaire. A travers ces
mots on comprend que pour l’auteur notre existence est faite
de plusieurs moi qui se substitue un à un et à tour
de rôle. Si nous rassemblions tous nos moi à un même
moment précis, si nous rassemblions tous les éléments
qui nous ont servis un jour à se forger et à faire
évoluer notre conscience, nous serions perdus car il y aurait
trop de facettes de notre personnalité, toutes mélangées,
parfois voir même opposées selon le degré de
changement de caractère d’une personne au cours de
sa vie. Chaque être doté d’une conscience ne
fait il pas dans ce cas l’objet d’une forme de négation
sur son passé ? « Le passé est insuffisant,
dépassé. », nous dira Alain. Quand l’auteur
dit qu’il n’est plus « cet enfant, cet ignorant,
ce naïf » et que « ce moment là même
» il était « autre chose en espérance,
en avenir », cela veut dire que notre propre identité,
qui est une donnée première de notre rapport au monde
et à notre existence, et donc qui suppose une conscience,
elle-même basé sur des faits passés, est une
chose en constance mouvance qui évolue tout au long de l’existence.
Je ne suis pas celui que je serais et je ne suis pas non plus celui
que j’étais. Alain a développé l’idée
selon laquelle toute conscience est attente, et anticipation. «
Ce que je voulais, je le suis devenu. », ces mots d’Alain
nous renvoie directement a Sartre. Il soutient la thèse selon
laquelle c’est l’homme lui-même qui, en choisissant
sa conduite, donne sens à sa propre existence. Cette phrase
est une phrase similaire à celle illustrant la théorie
de Sartre: « L’homme n’est rien d’autre
que ce qu’il se fait. ». Nous sommes responsable de
nos actes, nos actes influent ce moi en devenir et donc notre conscience,
on devient donc celui ou celle que nous avions choisit d’être.
Alain renforce cette idée dans la prochaine phrase, «
Voilà le lien […] pour le mal comme pour le bien ».
Cela implique le fait qu’il croit que chaque homme se doit
d’assumer ce qu’il est devenu. En effet, on constate
ici que pour Alain, le sujet est fondamentalement liberté,
c’est-à-dire « mouvement vers », engagement
dans un projet où s’actualise sa liberté. Celle-ci
étant par principe absolue, puisqu’il n’existe
pas de normes transcendantes pouvant orienter l’action (a
priori), elle s’accompagne d’une responsabilité
également totale. Cette thèse va donc à l’encontre
de l’inconscient tel que le propose Freud. Pour Alain, l’autonomie
du sujet est une évidence, une personne mauvaise a choisit
d’être comme cela, par ses actions, son passé.
Avec l’utilisation de l’expression « le lien entre
le passé et le présent », l’auteur renforce
l’idée de l’évolution dans la continuité
de notre moi en appuyant le fait que le passé soit le fondement
de notre existence et que le présent soit le moment de notre
existence, ces deux dimensions de la vie sont corrélés
et interviennent à elles deux sur la construction de la conscience.
Bien que je continue de prendre de l’âge et d’évoluer,
bien que je ne cesse de changer, dans ma façon d’être
par exemple, je demeure la même personne, le même moi.
Mais qu’est-ce que cette forme d’identité appelée
« moi » ?
Troisième
partie (lignes 7 jusqu’à la fin) : la conscience et
le refus du passé
C’est à cette question que répond l’auteur
dans la dernière partie, de la ligne 7 jusqu’à
la fin du texte. Alain aborde ainsi la question de la conscience
et du temps, il tente de démontrer le lien qui unit nos actes
passés à un soi présent, mais plus dans le
détail cette fois ci, contrairement a la seconde partie ou
il ne s‘intéressait pas beaucoup à son importance,
il accorde dans cette dernière partie beaucoup de valeur
au rôle du passé dans notre conscience en devenir.
Tout d’abord, Alain nous dit que « le moi est un refus
d’être moi, qui en même temps conserve les moments
dépassés. ». Ici, l’auteur nous explique
notre moi se construit sur une période indéfinie (
jusqu’à notre mort vraisemblablement puisque chaque
acte de notre vie joue sur notre identité et donc notre moi,
en le changeant plus ou moins, en le faisant évoluer), et
donc que ce moi, qui va changer au cours du temps, et un refoulement
d’un moi passé où le moi présent, et
sans cesse en mouvement, va venir interférer sur ce moi dépassé.
Mais notre soi présent n’est t’il pas influencé
par nos actions passés ? En effet dans cette phrase il nous
dit aussi que ce moi présent contient des éléments
du passés, notamment contenu dans l’inconscient, dans
ce qu‘on va plus précisément appelé la
mémoire, et que ceux-ci participent aussi activement a l’évolution
de notre identité. Et c’est cette mémoire qui
accompagne nos conduites pour constituer notre personnalité
comme une continuité sans faille. Cette forme d’identité
appelé moi est donc, selon Alain, un moi qui s’affirme
sans cesse et auquel tous nos actes confondus apportent une modification.
Le moi est selon Alain en mouvement permanent, en constante évolution.
Aussi, on constate que l’auteur souligne l’importance
du fait de se remémorer le passé, sans pour autant
vivre dans le passé avec la phrase : « Se souvenir,
c’est sauver ses souvenirs, c’est se témoigner
qu’on les a dépassés. ». En effet, nous
avons besoins de garder nos actes et notre vie passés en
mémoire afin de s’assurer que notre conscience, notre
soi, est entier. Car le déploiement vers une autre chose
que soi n’est possible qu’en s’appuyant sur le
passé, sur l’avoir été. L’homme
comme « existant » et comme conscience est toujours
un « être-déjà » dans le monde.
Mais Alain insiste surtout sur le fait que de ne pas vivre sur des
souvenirs est la preuve que l’on a un retour sur soi même,
propre a notre conscience, puisque selon lui nous pouvons, au fil
du temps, apporter une critique sur nos souvenirs, « les juger
» et donc les « dépasser ». On peut changer
d’avis sur des expériences acquises, ce qui explique
que « Le passé, ce sont des expériences que
je ne ferais plus. »
Avec l’exemple de l’artiste utilisé par Alain,
on peut parler d’une sublimation de l’inconscient à
travers l’art. En effet, l’artiste exprime son inconscient
par son art mais ne s’en rend compte qu’une fois sur
la toile. L‘artiste élabore son œuvre, sans toujours
savoir ce qui l‘a poussé à la réaliser
d‘une telle façon ou d‘une autre, c’est
la manifestation sensible d’une idée, dont on ne connaît
pas la signification avant de lui avoir donné vie, «
Un artiste reconnaît dans ses œuvres qu’il ne s’était
pas encore trouvé lui-même […] mais il y retrouve
un pressentiment de ce qui a suivi. ». Quand l’artiste
donne jour a une œuvre, c’est comme si il ne savait pas
le pourquoi de sa production mais c’est après lui avoir
donné l’interprétation souhaité, qu’il
en déduit le sens ainsi que se qui a commandé et guider
sa conception. Pour Alain, l’artiste est en premier lieu un
simple spectateur de son œuvre, avant de percevoir le message
qu’il s’est proprement envoyé. C’est en
regardant sa propre production et donc en se trouvant face à
une partie de lui-même qu’il n’avait jusque là
pas décelé, que l’artiste prend conscience de
chose en lui, sur lui, c’est le contenu latent de l’œuvre,
qui peut s’appliquer à toute production de l’inconscient.
«C’est cet élan qui ordonne les souvenirs selon
le temps. » signifie que c’est un projet quelconque
qui oriente l’action et la pensée et qui donne sens
au passé, c’est-à-dire à l’acquis,
afin de constituer le présent, même si ce dernier reste
introuvable. On peut dire que le temps est la dimension selon laquelle
l’homme déploie son activité pour faire œuvre.
L’auteur
termine donc son texte en nous rappelant que l’être
conscient n’existe qu’en tant que projection dans telle
ou telle figure du temps.
La
réponse de l’auteur au questions posées est
donc que toute conscience est anticipation et attente et donc qu’elle
n’est pas spontanée. De ce fait il nous indique aussi
que notre moi évolue constamment, qu’il n’est
jamais figé. Selon lui, la conscience est temporalité,
elle est en devenir. Alain ne le mentionne pas explicitement, mais
on peut comprendre que le futur est le lieu privilégié
de notre conscience. Et c’est d’ailleurs ce que je pense,
car après tout, le futur n’est il pas l’horizon
de la conscience ? N’est il pas son lieu privilégié
? Je pense que si, que même si le passé est son fondement
et le présent sont moment, c’est avec une projection
dans l’avenir que notre conscience avance. Je pense que contrairement
à ce que suggère la flèche du temps, c’est
le futur qui est prioritaire pour déterminer la conscience.
|