Comment
aujourd’hui, pouvons nous connaître le vivant ?Grâce
à qui (ou à quoi) avons-nous pu avoir la moindre
connaissance sur le vivant ? N’est-ce pas grâce à
la science ? Le science s’interroge sur tout ce qui nous
entoure, nous les êtres vivants. C’est une connaissance
exacte, universelle et véritable exprimée par des
lois. Elle permet à l’homme d’évoluer,
de s’affirmer. Alors à la question « Le corps
vivant peut-il être un objet de science ? », il semblerait
évident de pouvoir répondre « oui ».
Comment affirmer quoi que ce soit sur le vivant si nous ne pouvons
faire aucune expréimentation ? En effet, la science a besoin
du corps vivant pour faire progresser toute recherche. Pour cela,
elle doit faire abstraction de ce qui fait la particularité
du vivant . Le vivant, n’est-ce pas en effet un ensemble
unifié et relativement autonome, présentant des
fonctions spécifiques : la reproduction, l’action
de se nourrir ou encore la résistance à l’extérieur
en même temps que le besoin d’être en relation
continuelle avec lui ? Et cette définition, ne semble-t-elle
pas s’opposer à celle de l’objet ? Un objet
est quelque chose dont on peut faire ce que l’on veut, qui
n’a aucune valeur particulière, non doué de
raison, ni de conscience, mais aussi quelque chose d’uniquement
matériel. Si le corps vivant est un objet de science, cela
signifierait que la science ne prendrait plus du tout en compte
la personnalité, l’âme, les sentiments des
êtres humains. Et ne serait-ce pas la même chose avec
les animaux ? La science doit-elle alors respecter le vivant ou
est-il vraiment nécessaire pour nous qu’elle fasse
du corps vivant un objet ? Finalement, le corps vivant se distingue-t-il
vraiment des autres objets ou n’a-t-il pas quelque chose
de spéciale qui le distingue du monde matériel ?
Pour comprendre, le scientifique doit travailler à partir
de quelque chose : de la matière. Or pour essayer de trouver
de nouveaux traitements, de nouveaux médicaments, ne travaille-t-il
pas à partir de la matière ? Or, qu’es-ce
que le corps vivant ? N’est-ce pas un composé de
matière ? Le science voit donc le vivant avant tout comme
de la matière. Elle le voit comme un objet qui lui permet
d’avancer dans la recherche. Faut-il alors pour le connaître,
faire du corps vivant un objet ?
Le corps vivant pourrait très bien être comparé
à une machine. Le vivant et la machine fonctionnent selon
les mêmes principes. L’homme par exemple, fonctionne
comme un automate : ces gestes sont répétés,
son cerveau marche toujours de la même façon, etc…
Il est fait de pleins de mécanismes. Lorsque les hommes
travaillent à la chaîne par exemple, ne sont-ils
pas assimilés à des machines ? Tout au long de la
journée, ils répètent les mêmes gestes
inlassablement. Dans ces cas-là, ils ne réfléchissent
même plus à ce qu’ils font au bout de quelques
mois dans leur entreprise. Leurs gestes sont calculés pour
qu’ils fassent tant de choses en tant de temps, ils ont
des objectifs à réaliser et sont formés pour
ne faire qu’un seul type de tâche. Or aujourd’hui,
dans notre société, ces ouvriers là, ne sont-ils
pas remplacés par des robots capables de réaliser
le même travail ? Parfois même mieux ? Les robots
sont plus performants, sont supérieurs alors à l’homme.
Cet exemple ne nous démontre-t-il pas que l’homme
et la machine ont les mêmes procédés de fonctionnement
? Le corps physique est donc une machine aux processus mécanique.
Les scientifiques ont depuis bien longtemps compris ce principe.
Descartes fût le premier à proposer le modèl
de la machine, de l’automate pour penser le corps. Sa théorie
du mécanisme considère le vivant par analogie avec
la matière brute, option féconde pour la recherche
car cela permet de l’étudier par des méthodes
d’observation et d’expérimentation qui ont
fait leurs preuves en chimie et en physique. Pour pouvoir comprendre
le corps vivant, Descartes le pensait donc simplement comme un
mécanisme. Il ne voyait pas en lui une particularité
spéciale qui permettait à l’organisme vivant
de s’organiser. Descartes affirmait qu’il «
ne reconnaissait aucune différence entre les machines que
font les artisans et les divers corps que la nature seule compose.
» Les organismes vivants ne sont pour Descartes que des
automates. Ce modèle cartésien a annoncé
finalement les progrès de la science future. Chaque étape
de la science biologique est en effet marquée par la découverte
de déterminisme pysico-chimique, donc par une victoire
du mécanisme et un recul du vitalisme (explication des
fonctions organiques par un mystérieux principe qui serait
propre au vivant ).
Aujourd’hui, lorsqu’on parle de science, n’est-on
pas obligé de faire référence à du
concret, des principes visibles et clairement explicables? La
connaissance scientifique n’est-elle pas par nature matérialiste?
N’est-on pas contraint, si on veut connaître une chose
de la réduire à de la matière , à
du mesurable? Or, le corps n’est-ce pas de la matière,
une notion justement mesurable? Si le scientifique veut arriver
à quelque chose, il doit donc ne prendre en compte que
l’aspect matérialiste du vivant. Le mécanisme
est d’ailleurs une variante du matérialisme. Pour
les scientifiques, le corps est un composé d’atomes.
L’homme ne peut s’empêcher de prêter un
tas de caractéristiques au vivant, comme la finalité
: le projet qui supposerait l’existence d’une âme,
d’une mémoire, qui ferait « se reproduire ».
Or, cela est-il vriament scientifique? Non, le scientifique s’efforce
de lui enlever ceci, pour faire du corps vivant un support pour
la science. Il ne s’intéresse qu’à son
aspect biologique, qu’à se qu’il peut expliquer
par des théories, ou grâce à des expériences
concrètes, qui ne feraient pas intervenir de notions spirituelles.
Le corps peut donc et doit être un objet pour la science.
Comment aujourd’hui pourrions nous guérir de telle
ou telle maladie, si les chercheurs ne s’étaient
pas servis des animaux comme cobayes? Toutes les thérapies,
les médicaments, les traitements sont testés sur
des êtres vivants avant de pouvoir être réellement
utilisés par la médecine. Il est donc nécessaire
que les scientifiques considèrent les animaux comme des
objets. Arriverions nous à des telles avancées dans
le domaine scientifique ( pour les maladies rares par exemple)
si les scientifiques devaient tenir compte de l’âme
des vivants? N’es-ce pas l’homme qui a besoin de donner
du sens au monde qui l’entoure, et qui surtout ne peut s’empêcher
d’attribuer à l’ordre, l’organisation,
une cause capable de produire cet ordre, cette organisation, c’est-à-dire
un esprit? Mais ceci est-il vraiment scientifique? Pour avancer,
le scientifique ne doit s’appuyer que ce sur quoi il peut
être certain et qui peut être vérifiable.
Le corps vivant peut donc être considéré comme
un objet de science. Cela est nécessaire pour l’humanité,
pour la recherche, pour la science. Il est assimilable à
une machine, il a des procédés similaires, il faut
donc alors pour trouver comment il fonctionne, comment le comprendre,
ne tenir compte que de ces procédés biologiques
et faire abstraction de quelconque spritualité. Mais, dans
notre société, si on y regarde bien finalement,
cela est-il vraiment possible ? Certes faire du vivant un objet
permet de mieux le comprendre, mais cela est-il vraiment moral
? Le corps vivant peut-il vraiment être un objet de science
? Le corps vivant est-il un objet comme un autre ? Ne faut-il
pas avoir peur de tomber dans l’immoralité ?
Faire
du vivant un objet de science a une connotation péjorative.
Cela voudrait dire que l’on se fiche de ce qu’il peut
ressentir. Est-ce vraiment moral de faire subir tout et n’importe
quoi à un être vivant ? Les animaux ne souffrent-ils
pas de toutes les expériences ? Les êtres vivants
qu’ils soient animaux ou humains méritent-ils vraiment
d’être consiédés comme des objets, comme
de simples instruments de laboratoire ? L’homme ne peut
pas le traiter ainsi car n’entretient-il pas lui-même
avec son corps une relation particulière ?
Le corps vivant est en effet un composé d’esprit
et de matière. Le corps ne m’est pas extérieur
comme n’importer quelle chose du monde ! Nous avons vu précédemment
que le corps humain n’était qu’un objet, mais
mêm si nous pouvons le contempler de l’extérieur
et le mettre à distance, il a quand même une présence
différente de celle des autres objets matériels.
Le corps de l’homme est effectivement à la fois un
corps objet et un corps sujet, un corps que l’on a et un
corps que l’on est. Chaque partie de notre corps est à
la fois une partie de nous et un objet extérieur que nous
pouvons contempler. Le corps humain est donc à la fois
objet et sujet. Si par exemple j’ai mal, c’est la
totalité de mon être qui va souffrir. Pourrions-nous
alors toujours dire ici, que le corps vivant peut-être un
objet de science ? Le corps vivant est certes de la matière
mais il est très lié à l’esprit de
l’homme. Or le considérer comme un objet, c’est-à-dire
quelque chose dont on peut faire ce que l’on veut qui n’a
aucune valeur particulière, non doué de raison,
ni de conscience ; mais aussi quelque chose d’uniquement
matériel, cela voudrait dire dire qu’il faille lui
enlever son esprit, son âme, bref ce qui fait sa particularité.
Et qu’est-ce que l’esprit ? L’esprit est le
siège suposé de la pensée, des sentiments.
Or si nous « traitons » le corps vivant comme un objet,
où est la part d’humanité, de sensibilité
des hommes ? Mais la question ne se pose pas uniquement avec l’homme.
Il ne faut pas en effet oublier que le corps vivant ne concerne
pas que l’humain. Les animaux sont peut être les plus
grandes victimes de la science. Nous ne devons pas faire d’eux
des objets. Cela est immoral. Ils souffrent car même s’ils
ne sont pas dôtés d’une conscience réfléchie,
ils ont une forme de conscience immédiate, c’est-à-dire
qu’ils perçoivent, sentent les choses, le monde qui
les entourent sans le savoir. Certes, ils ne savent pas qu’ils
existent, qu’ils sont des sujets, ils ne peuvent pas juger
leurs actions en termes de bien et/ou de mal ; mais le fait que
certains êtres vivants soient doués de conscience
fait que nous ne pouvons pas faire d’eux ce que nous voulons
! Ce ne sont pas des choses, comme dirait Sartre, ce ne sont pas
des « en-soi » : ils ne sont pas fermés sur
eux. Le vivant a donc quelque chose que l’inerte, la simple
matière, ne posséde pas. Cette chose fait donc de
lui un être à part entière, qu’on ne
peut pas ne pas respecter. Mais qu’est-ce que cette chose
? Qu’est-ce qui distingue encore le vivant de l’inerte
?
Nous avons vu que pour Descartes, le vivant ne suppose rien de
spécial : on a besoin de rien d’autre que des lois
du mouvement, le corps était assimilé à une
machine. Or le vivant a quelque chose de spécifique par
rapport à la machine (et aux objets) : il est autonome.
Il est capable de s’auto-organiser, de s’auto-réguler
et même de s’auto-engendrer. Le foie par exemple est
capable de se reformer lui-même. C’est Kant qui s’oppose
ici à Descartes dans La Critique de la faculter de juger.
Dans sa critique du mécanisme cartésien, Kant nous
prouve bien que le vivant n’est pas la même chose
qu’une machine. Considérons l’œil d’un
vertébré : on peut certes le comparer à une
machine, en l’espèce à un appareil photographique
(lentilles, diaphragmes, pigments, photosensibles). On peut expliquer
le fonctionnement de l’œil par des mécanismes
optiques (formation de l’image, fonctionnement du cristallin
comme lentille) et par des mécanismes neurologiques (projection
de l’image sur la zone visuelle de l’écorce
cérébrale). Il reste qu’il y a une différence
entre l’œil, cet organe vivant, et une machine. Un
appareil photographique a été fabriqué par
un agent extérieur (le constructeur) ; il est fait de parties
juxtaposées de l’extérieur. L’organe
vivant n’est pas une juxtaposition d’éléments
mais une structure autonome dont les constituants sont subordonnés
à un fonctionnement global. L’organe vivant appartient
lui-même à un organisme qui apparaît comme
un individu, c’est-à-dire comme un ensemble unifié
et relativement autonome. Le corps vivant s’oppose donc
bien à un objet, on ne peut donc pas le considérer
comme un objet de science. On ne peut pas faire des expériences
sur lui, comme on peut en faire sur n’importe quel objet.
Il n’est pas maniable comme une chose, il n’a pas
les propriétés d’une chose. Peut-être
est-ce d’ailleurs pour cela qu’il intéresse
autant les scientifiques ?
Dans le vivant on retrouve effectivement la notion de vie. La
vie, c’est le fait de se nourrir, de croître, et de
dépérir par soi-même. L’être vivant
fait tout pour se maintenir en vie. Pour cela, Aristote supposait
l’existence de quelque chose « comme » une âme.
La matière est en effet aveugle, elle n’a pas d’intelligence,
pas de mémoire. On ne peut donc comprendre, si on se restreint
à la matière, comment l’être vivant
peut maintenir son intégrité. L’être
vivant est une substance composée : l’âme anime
le corps, le rend capable d’exercer ses fonctions d’être
vivant. Le corps ne peut donc pas être considéré
comme un objet puisqu’on ne peut le séparer de son
âme. Les deux fonctionnent ensemble. Or peut-on jouer avec
les sentiments des gens ? Peut-on se permettre de faire souffrir
quelqu’un ? En effet, si je décide de faire telle
expérience sur le corps d’un être vivant, ce
n’est pas seulement sur son corps que je vais agir mais
aussi sur son esprit, sur son âme. Et cela n’est-il
pas immoral ? N’est-ce pas aller contre le respect des individus,
comme des animaux ? En effet, l’âme n’est pas
une notion propre à l’homme. Il y a autant de formes
d’âmes que d’êtres vivants. Les arbres,
les plantes ont une âme végétative qui leur
permet de se maintenir en vie ; les animaux ont une âme
senso-motrice qui leur permet de percevoir, sentir, ressentir
mais aussi de se mouvoir. Les humains ont eux une âme intellectuelle
qui leur « donne » de l’intelligence, la pensée.
Le corps vivant n’est donc pas juste de la matière.
Avec lui, c’est tout un système psychique qui se
met en route. On ne peut pas faire ce qu’on veut d’un
corps vivant comme on pourrait faire ce que l’on veut d’une
balle par exemple. Il ne faudrait pas oublier non plus que la
science ne peut pas tout expliquer. La vie elle-même n’est
pas réductible à la science . L’esprit, l’âme
permet aujourd’hui la vie de chacun d’entre nous.
Que serions nnous si nous n’étions que des corps
dépourvus de moral, de raison ? C’est l’âme
qui permet aujourd ‘hui notre humanité. Imaginon
que demain un homme soit cloné des centaines de fois. Son
corps est utilisé par la science pour qu’il n’existe
qu’une « race » de cette personne. Que va-t-il
se passer ? Tous les hommes vont se ressembler, ils ne seront
plus capables de penser par eux-mêmes et même s’ils
le faisaient, leur pensées seraient les mêmes. Or
vivre dans un tel monde, ne serait-ce pas la fin de l’humanité
et donc la disparition de toute vie sur terre ? Ne viverions nous
pas dans un monde à l’image de Meilleur des Mondes
d’A. Huxley ? Un monde, où plus rien ne se passe,
tous les rapports sont calculés, les gens ne réfléchissent
plus, sont conditionnés… Ici, ne serait-ce pas la
victoire de la science sur l’humanité ? Or que risque-t-il
d’arriver si on laisse le corps vivant devenir un objet
de science ?
Le corps vivant n’est pas un simple composé de matière.
C’est une notion beaucoup plus complexe qui fait appel à
l’esprit, à l’âme. Les deux sont certes
distingués l’un de l’autre (l’un est
visible, l’autre pas) mais ne forment qu’une seule
entité. Or, la science prend-elle en compte cet aspect
du vivant ? Ne s’occupe-t-elle pas plutôt seulement
de l’aspect physique du corps vivant ? N’en n’oublie-t-elle
pas ce qui fait la particularité de celui-ci : la vie ?
A-t-on
donc vraiment le droit de faire ce que l’on veut du vivant
? En effet, si l’on parle du corps vivant, on parle automatiquement
aussi de son esprit et pas seulement de sa forme physique . Le
corps n’est donc plus uniquement qu’un composé
de matière. Toucher à son intégrité
physique revient donc aussi à toucher à son statut
d’être vivant, donc d’être conscient.
La véritable questions qui se pose sous « Le corps
vivant peut-il être un objet de science » serait plutôt
cette question morale : « Doit-on respecter le vivant »
? Or, la science le respecte-t-elle vraiment tout le temps ? Ne
le considère-t-elle pas parfois seulement comme un instrument
de science ? Certes la science, les recherches permettent de nombreux
progrès mais ceux-ci doivent-ils prendre forme aux dépends
du respect de la vie d’un être ? Et avec toutes les
avancées scientifiques que nous connaissons aujourd’hui
dans notre société , ne rique-t-on pas parfois d’aller
trop loin ? De tomber dans l’immoralité avec la disparition
de certaines valeurs ? Les êtres vivants ne sont pas des
choses comme les autres : ils se distinguent grâce à
un principe très simple : la vie. Or, la vie a-t-elle le
devoir d’être sacrifiée simplement pour des
recherches scientifiques qui n’aboutiront à rien,
ou qui au contraire sauveront des vies mais seulement après
avoir tué de nombreux êtres vivants pour trouver
la solution ? La science ne va-t-elle pas parfois trop loin dans
sa volonté d’avancer ? Quelles sont ses limites ?